« Bloody Niggers » met l’homme à nu
« Bloody Niggers » met l’homme à nu
« Où est le bien ? Où est le mal ? »
Acteurs déchaînés avec des propos rageurs allant de l’ironie à la gravité, illustrés par des images, du texte et de la musique, une scène dénudée exposée à de la lumière claire et ensuite bleuâtre. C’est la substance de Bloody Niggers, cette pièce qui interpelle les consciences.
Dorcy Rugamba, Younouss Diallo, et Philippe Toussaint sont debout côté cour, chacun devant son microphone. Leur visage grave en dit long sur le sérieux de l’ordre du jour. Devant eux, un tabouret sert de réceptacle à une tête humaine. A l’avant scène un mortier, un pilon et une planche qui contraste avec les tenues endimanchées des comédiens.
Leurs propos sont illustrés par de la musique et surtout les images et du texte projeté sur un écran surmontant un mur qui bien que symbole de protection, nous rappelle les tristement célèbres murs de Berlin et celui des Lamentations.
Les textes profonds, convoquent aussi bien ceux qui se font passer comme exemple civilisation qu’à ceux qui se prennent pour des éternels victimes, sur le champ de l’introspection. L’histoire de l’humanité en entachée d’ignominies qui font de lui le plus insensé des animaux, capable de tuer son semblable par plaisir. Sous la lumière claire, les comédiens nous font passer du Moyen âge à la dernière guerre d’Irak en passant par les attentats 11 septembre 2001, l’épisode de notre histoire que nous assumons le moins. Ils interpellent ensuite sur une scène baignée dans un bleu apaisant qui contraste avec la rage de leur propos, les consciences. Ne sommes nous pas responsables, Chrétiens et Musulmans, Noirs et Blancs de cette déchéance de l’être humain ? Qui sommes nous pour décider de ce qui bon les autres ?
A travers cette pièce qui donne plus de place à la parole au détriment du jeu d’acteur, Dorcy Rugamba qui a vécu l’horreur dans son Rwanda natal, met le doigt là où ça fait mal pour susciter le débat que l’humanité a toujours fuit. Le choix de la mise en scène est sujet à débat chez les professionnels. Certains parlent de « mise en situation » et non mise en scène. Bref ! Pour le contenu, il est temps que les polémiques se taisent. Cette petite plante verte sur la scène est sans doute le signe d’un nouveau souffle. Celui qui aidera l’humanité à se regarder en face et accepter que nous sommes tous gris parce que nul n’est tout « blanc » ou tout « noir ».
David Sanon