Egblé Makou, le quatuor qui fait feu de tout bois

Egblé Makou, le quatuor qui fait feu de tout bois

 

Par David Sanon

 

Ce jeudi 18 décembre 2008, c’est la compagnie Fabre/Sènou que recevait le CCF-GM dans le cadre de « Dialogues de corps ».

 

A voir le décor de la scène, on se croirait à un concert de musique. Côté jardin, une guitare acoustique, une cymbale sur pieds et une autre suspendu au toit et deux caisses sous forme d’enceintes acoustiques. Côté cour, une flûte traversière, un xylophone et une troisième caisse. Comme piqués par le même germes, trois des quatre danseurs, précédemment assis sur les caisses, exécutent des pas effrénés de danses africaines sur les belles notes de la guitare bien occidentale du quatrième. Tout cela semble insolite mais d’une telle beauté. La musique n’a vraiment pas de frontière.

 

Cette création qui est passée à Libourne, Bordeaux et Pris où elle a été jouée 14 fois, transforme le corps de l’homme en instrument de musique en le poussant à l’extrême. Les deux mois qu’a duré la création, ont vraiment été mis à profit pour un résultat qualitatif. On voit les danseurs marcher nu pieds sur la partie extérieure de leurs orteils. C’est à faire frémir mais ils semblent transfigurés par leur élan. Les sons fusent de partout. Des paumes tapées sur les cuisses ou la poitrine, la langue claquée contre le palais, des caisses, du xylophone, de la flûte, des cymbales etc. les danseurs font feu de tout bois. La frontière entre la musique et la danse tombe. Les percussions d’instruments, des corps et les voix dominées par les onomatopées. Les paroles sont rares sauf quand dans une scène de joie au village, le guitariste se moque d’un autre musicien. La seule femme du quatuor comme dans les incantations lors des cérémonies sacrées, le rabroue en langue fon. On ne doit pas se moquer de la musique de l’autre. Elle est toujours belle parce que c’est ce que notre corps offre spontanément de nous. Y a-t-il meilleur appel à l’universalité de la musique ?

 

Pour Norbert Sénou, qui a codirigé la création avec Caroline Fabre, on ne devrait pas catégiriser les instruments de musique selon leur origine. Un européen peut bien danser sur le balafon tout comme l’africain peut exécuter ses pas traditionnelle sur les notes de guitare. C’est cette horizontalité que nos corps expriment de façon naturelle qu’il extériorise. Selon lui nous faisons violence sur nous même en imposant à nos corps, ce qui n’existe que dans nos esprits. Comme il le dit : « C’est ce que vit notre corps qui est projeté sur l’instrument. Le corps est le territoire du son et du mouvement ». Pour lui les territoires géographiques ne peuvent pas s’appliquer à la musique. Il n’est plus besoin de se demander si c’est à un concert où à un spectacle de danse contemporaine que nous avons assisté.

 

C’était sublime et le public a su le rendre aux danseurs par un tonner d’applaudissements. Egblé Makou signifie en fon : ça passe ou ça casse ! Cette fois-ci, ça a passé.

 

 



22/12/2008
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