L'ambiance d'hier à l'aéroport de Ouaga (Grève à l'ASECNA)
Grève à l'ASECNA
L'ambiance d'hier à l'aéroport de Ouaga
Comme annoncé dans nos précédentes éditions, les contrôleurs aériens de l'ASECNA sont effectivement allés en grève de 48 heures à compter d'hier 29 juillet à 13h 00 TU. Nous avons, à cette heure, fait un tour à l'aéroport de Ouaga pour prendre son pool. Constat.
Mardi 29 juillet 2008, 13 h 00 TU. Des contrôleurs aériens de l'Agence pour la sécurité de la navigation aérienne (ASECNA) cessent le travail à l'aéroport international de Ouaga. Cette grève qui entre dans le cadre d'un mouvement appelé "silence radio" devrait se tenir en simultané dans 16 des 17 pays membres de l'ASECNA. Seul le Sénégal (qui veut dire adieu à l'ASECNA) est en retrait de ce mouvement. A 13 h TU, était programmé un vol d'Air Burkina en destination d'Abidjan via Bobo Dioulasso. Mais à 14 h, l'appareil est encore cloué au sol et les enregistrements sont toujours en cours. Une dame à l'accueil nous confie que le vol est simplement en retard pour raison de grève à l'ASECNA. Mais, poursuit-elle optimiste, "le vol, c'est dans quelques minutes, puisque le mot d'ordre de grève est levé". "Faux!" rétorque le président de l'Association professionnelle des contrôleurs aériens du Burkina (APCAB) que nous avons aussitôt joint au téléphone. Gosso Djerma et les siens qui nous ont, par la suite, reçus à la Cantine de l'aéroport expliquent que les Forces de l'ordre ont demandé aux membres de l'équipe de garde de signer un document qui les engagerait à assurer le service complet. Et suite au refus de l'équipe de parapher l'engagement, elle a été mise en demeure de déguerpir la Tour de contrôle, puis a été aussitôt remplacée par une équipe de 2 agents dépêchés par l'administration de l'ASECNA. "Ce sont des gens qui ne devraient pas faire ce travail", soutient Alain Zida, l'un des contrôleurs aériens. Et Ousmane Yé de préciser que l'un des agents envoyés en secours à la Tour de contrôle a perdu sa qualification de contrôle de la navigation aérienne. Pire, renchérit-il, "le chef du service de navigation aérienne de l'aéroport de Ouaga a osé lui-même prendre le micro du contrôle, ce qui est extrêmement grave". Au cours de nos échanges, l'un des contrôleurs reçoit un coup de fil qui lui annonce l'annulation du vol Air Burkina à destination d'Abidjan. "Le pilote a certainement refusé de voler, eu égard à la qualité des agents qui assurent le contrôle", a dit le président de l'APCAB. "Et même si l'appareil arrivait à voler au départ de Ouaga, il ne pourrait atterrir ni à l'aéroport de Bobo, qui est complètement fermé du fait de la même grève, encore moins à Abidjan.
De retour à l'aéroport, on nous confirme l'annulation du vol. La raison est connue : Air Burkina ne peut pas atterrir à Abidjan en raison de la grève à l'ASECNA. Les voyageurs replient bagages et quittent désespérément l'aéroport. L'un d'entre eux, M. Simporé, nous a fait part de sa déception de ne pas pouvoir prendre part à un congrès qui débute ce matin même à Abidjan. Grande fut également la déception de Catherine, citoyenne française qui devrait quitter Ouaga à destination de Yaoundé via Abidjan et Douala, pour impérativement être à son bureau dans la capitale camerounaise jeudi matin. Mais en quittant l'aéroport, les passagers d'Air Burkina ont croisé ceux de la Compagnie aérienne du Mali (CAM) en position d'embarquement. Et quelque temps après, un appareil de la CAM a effectivement atterri à l'aéroport de Ouaga, d'où il est parti un peu plus d'une heure après.
C'est donc dire que l'aéroport de Ouaga a fonctionné hier soir grâce à l'équipe de contrôleurs aériens mise en place par la direction de l'ASECNA.
Gbagbo en vol risqué ?
Tous ces vols, selon les contrôleurs en grève, sont risqués. Car ceux qui en ont officié le contrôle n'ont pas la qualification requise pour le faire. Même le vol de l'avion présidentiel ivoirien intervenu hier soir aux environs de 18 h est à risque, soutiennent les grévistes. Les membres de l'APCAB ont toutefois tenu à préciser que leur mouvement, qui continue en principe aujourd'hui, ne visait aucunement les autorités burkinabè. Il répond seulement, à leurs dires, à un besoin de satisfaction d'un certain nombre de revendications soumises à la direction générale de l'ASECNA.
Le représentant de l'ASECNA au Burkina, Pafadnam Yarcé, que nous avons joint au téléphone, a qualifié cette grève de "sauvage". Avant d'ajouter qu'elle n'avait touché que le Niger, le Mali, le Burkina et la Côte d'Ivoire. Pafadnam Yarcé précise aussi que le Tribunal du travail, qui avait en charge le dossier, a jugé ce mouvement "illégal" et condamné les travailleurs aux dépens, conformément aux résultats du référé tombés hier matin. Et il en fut pratiquement de même pour ceux du Niger et de bien des pays. De l'avis du représentant de l'ASECNA, les contrôleurs aériens en grève sont manipulés par "ceux qui veulent faire tomber l'ASECNA". Mais, poursuit-il, "on est en train de voir comment régler définitivement ce problème, même s'il faut remercier des contrôleurs comme cela s'est fait dans certains pays". Invité à se prononcer sur la qualité des contrôleurs qui ont constitué l'équipe de remplacement, Pafadnam Yarcé a indiqué qu'il s'agissait simplement de contrôleurs qui se sont engagés à assurer le service complet. Et d'ajouter que tout serait mis en oeuvre pour accorder un temps de repos à cette équipe, même s'il va faudra momentanément fermer l'aéroport.
En rappel, les revendications des contrôleurs aériens tournent essentiellement autour du relèvement du niveau d'accès à la formation initiale au Diplôme d'études universitaires générales scientifiques.
Paul-Miki ROAMBA
Le Pays du 30 juillet 2008