TONTON ROBERT : le maître de la baguette
La batterie, descendante du washboard, a été créée spécialement pour le jazz. Mais chose bizarre, c'est le batteur qu'on voit le moins dans un groupe musical. De part sa position sur la scène qui fait qu'il est caché par les autres musiciens, il est le moins connu de l'orchestre. Le batteur, dans un groupe, c'est le type interchangeable qui tape, au fond là-bas. On le voit à peine. On ne connaît pas son nom. Dans l'imaginaire collectif, au mieux, il est une sorte de métronome qui, parfois, fait le spectacle. Robert BATCHOUDI que tout le monde appelle affectueusement « tonton Robert» fait partie de ce bataillon de l'ombre.
Il est venu à la musique en tapant sur des boites et le « kamu », un tam-tam de la région de Kara (Togo, son pays d'origine) quand il était tout petit. Il va tendre par la suite au toumba. C'est pendant une tournée en 1966 au Ghana avec l'artiste congolais Henry Bouani qui l'encourage à jouer de la batterie qu'il se tourne vers cet instrument. Sans maître, il découvre la batterie. Cette idylle dure aujourd'hui 42 ans et n'a pas pris une seule ride. Tonton Robert (58 ans sonnés) n'a pas oublié sa première rencontre avec le Burkina. Il se rappelle de cette expédition difficile sur Pô où ils devraient jouer, et que seul son jeune âge a plaidé en faveur du groupe dont personne n'avait un papier d'identité. De retour au pays, l'envie de découvrir Ouagadougou l'emportera. En 1970, il y dépose définitivement ses valises. Il a depuis, la nationalité burkinabé. Lui, sa femme et ses deux enfants vivent grâce à sa maîtrise des baguettes.
Sous la Révolution, il est encadreur des « Petits Chanteurs aux points levés » et des « Colombes de la Révolution ». De cette expérience sortiront des batteurs de renom tels Ablo Zon, Wendlaviim, Caroline Yaguibou, Dramane Kiénou (Italie) et Tiémoko Koné (Italie) pour ne citer que ceux-là.
Robert n'a aucune gêne à dire son âge à qui veut l'entendre. Comme disait Jean de La Bruyère dans « Les Caractères » (1696), « Celui qui continue de cacher son âge pense enfin lui-même être aussi jeune qu'il veut le faire croire aux autres. », Robert pense qu'il faut s'assumer et surtout savoir que « l'on n'est jamais trop vieux pour apprendre ». Malgré tant d'années de loyaux services rendus à la Nation, Tonton Robert n'a jamais bénéficié d'une quelconque distinction honorifique pendant que de nombreux acteurs de la vie culturelle du Faso, beaucoup moins méritants que lui ont été décorés. Mais cela ne l'émeut guère. Tonton Robert pense que tous ses voyages effectués à Cuba, au Congo, en Libye...sans salaire l'ont été pour le pays. Sa satisfaction aujourd'hui, c'est de voir sur scène toute cette génération de batteurs qu'il est fier d'avoir formée.
La musique, c'est toute la vie de Tonton Robert. Pour cela, la formation le préoccupe. Il appelle de tous ses vœux un regard du ministère de tutelle, sur l'état de délabrement avancé dans lequel baigne aujourd'hui l'Institut National de Formation Artistique et Culturelle (INAFAC), où il est enseignant. Un de ses souhaits, c'est de voir les enseignants de musique sortis de l'INAFAC mis en valeur en les associant aux jurys des différentes compétitions musicales.
Instrumentiste de talent, Robert bat en brèche les idées reçues qui font passer les batteurs pour des gens qui auraient connu une enfance difficile. Cet instrument, il y joue par plaisir. Comme conseil à tous ceux qui font des arrangements dans des mini-studios, il leur demande d'enregistrer en live pour améliorer la qualité du son.
Après 38 ans passés au Burkina, et malgré la certificat de nationalité en bonne et due forme, Robert se voit traité d'étranger en 2000 par le directeur de l'INAFAC de l'époque, parce qu'il protestait contre son projet de ramener le prix de l'heure de vacation de 2500 à 1500FCFA. Cette inconduite de la part d'un responsable lui est restée comme un os au travers de la gorge.
Robert vit aujourd'hui une nouvelle expérience en formant le jeune aveugle, Jean Sawadogo, à la pratique de la batterie.
« Si les premiers responsables du ministère de la Culture pouvaient rencontrer les artistes, pas pour donner de l'argent, mais seulement pour comprendre, ce serait bien », aime-t-il dire. Il trouve l'injustice trop grande quand des cachets faramineux sont versés aux artistes venus d'ailleurs contre des miettes aux locaux.
Même s'il a parfois l'impression que certaines personnes éprouvent un malin plaisir à voir les artistes dans la misère, Robert a foi à l'amélioration des conditions de vie des artistes. Son vœu le plus cher, c'est d'avoir les moyens pour acquérir d'autres équipements en plus de ses deux batteries afin d'ouvrir sa propre école de formation.
David Sanon
La batterie, descendante du washboard, a été créée spécialement pour le jazz. Mais chose bizarre, c'est le batteur qu'on voit le moins dans un groupe musical. De part sa position sur la scène qui fait qu'il est caché par les autres musiciens, il est le moins connu de l'orchestre. Le batteur, dans un groupe, c'est le type interchangeable qui tape, au fond là-bas. On le voit à peine. On ne connaît pas son nom. Dans l'imaginaire collectif, au mieux, il est une sorte de métronome qui, parfois, fait le spectacle. Robert BATCHOUDI que tout le monde appelle affectueusement « tonton Robert» fait partie de ce bataillon de l'ombre.
Il est venu à la musique en tapant sur des boites et le « kamu », un tam-tam de la région de Kara (Togo, son pays d'origine) quand il était tout petit. Il va tendre par la suite au toumba. C'est pendant une tournée en 1966 au Ghana avec l'artiste congolais Henry Bouani qui l'encourage à jouer de la batterie qu'il se tourne vers cet instrument. Sans maître, il découvre la batterie. Cette idylle dure aujourd'hui 42 ans et n'a pas pris une seule ride. Tonton Robert (58 ans sonnés) n'a pas oublié sa première rencontre avec le Burkina. Il se rappelle de cette expédition difficile sur Pô où ils devraient jouer, et que seul son jeune âge a plaidé en faveur du groupe dont personne n'avait un papier d'identité. De retour au pays, l'envie de découvrir Ouagadougou l'emportera. En 1970, il y dépose définitivement ses valises. Il a depuis, la nationalité burkinabé. Lui, sa femme et ses deux enfants vivent grâce à sa maîtrise des baguettes.
Sous la Révolution, il est encadreur des « Petits Chanteurs aux points levés » et des « Colombes de la Révolution ». De cette expérience sortiront des batteurs de renom tels Ablo Zon, Wendlaviim, Caroline Yaguibou, Dramane Kiénou (Italie) et Tiémoko Koné (Italie) pour ne citer que ceux-là.
Robert n'a aucune gêne à dire son âge à qui veut l'entendre. Comme disait Jean de La Bruyère dans « Les Caractères » (1696), « Celui qui continue de cacher son âge pense enfin lui-même être aussi jeune qu'il veut le faire croire aux autres. », Robert pense qu'il faut s'assumer et surtout savoir que « l'on n'est jamais trop vieux pour apprendre ». Malgré tant d'années de loyaux services rendus à la Nation, Tonton Robert n'a jamais bénéficié d'une quelconque distinction honorifique pendant que de nombreux acteurs de la vie culturelle du Faso, beaucoup moins méritants que lui ont été décorés. Mais cela ne l'émeut guère. Tonton Robert pense que tous ses voyages effectués à Cuba, au Congo, en Libye...sans salaire l'ont été pour le pays. Sa satisfaction aujourd'hui, c'est de voir sur scène toute cette génération de batteurs qu'il est fier d'avoir formée.
La musique, c'est toute la vie de Tonton Robert. Pour cela, la formation le préoccupe. Il appelle de tous ses vœux un regard du ministère de tutelle, sur l'état de délabrement avancé dans lequel baigne aujourd'hui l'Institut National de Formation Artistique et Culturelle (INAFAC), où il est enseignant. Un de ses souhaits, c'est de voir les enseignants de musique sortis de l'INAFAC mis en valeur en les associant aux jurys des différentes compétitions musicales.
Instrumentiste de talent, Robert bat en brèche les idées reçues qui font passer les batteurs pour des gens qui auraient connu une enfance difficile. Cet instrument, il y joue par plaisir. Comme conseil à tous ceux qui font des arrangements dans des mini-studios, il leur demande d'enregistrer en live pour améliorer la qualité du son.
Après 38 ans passés au Burkina, et malgré la certificat de nationalité en bonne et due forme, Robert se voit traité d'étranger en 2000 par le directeur de l'INAFAC de l'époque, parce qu'il protestait contre son projet de ramener le prix de l'heure de vacation de 2500 à 1500FCFA. Cette inconduite de la part d'un responsable lui est restée comme un os au travers de la gorge.
Robert vit aujourd'hui une nouvelle expérience en formant le jeune aveugle, Jean Sawadogo, à la pratique de la batterie.
« Si les premiers responsables du ministère de la Culture pouvaient rencontrer les artistes, pas pour donner de l'argent, mais seulement pour comprendre, ce serait bien », aime-t-il dire. Il trouve l'injustice trop grande quand des cachets faramineux sont versés aux artistes venus d'ailleurs contre des miettes aux locaux.
Même s'il a parfois l'impression que certaines personnes éprouvent un malin plaisir à voir les artistes dans la misère, Robert a foi à l'amélioration des conditions de vie des artistes. Son vœu le plus cher, c'est d'avoir les moyens pour acquérir d'autres équipements en plus de ses deux batteries afin d'ouvrir sa propre école de formation.
David Sanon