Un an après, la flamme de la paix brûle toujours en Côte d’Ivoire

Sortie de crise en Côte d’Ivoire

Un an après, la flamme de la paix brûle toujours

 

Bras dessus, bras dessous, le président Laurent Gbagbo et son Premier ministre, Guillaume Soro, étaient hier à Bouaké pour célébrer le premier anniversaire de la flamme de la paix, cette gigantesque cérémonie qui, le 30 juillet 2007, a marqué officiellement la fin de la crise ivoirienne. Pour cette commémoration, la ville de Bouaké s’est  encore parée de ses plus beaux atours pour accueillir les deux responsables de l’exécutif ivoirien ainsi que du président burkinabè, Blaise Compaoré, et du représentant du malien, Amadou Toumani Touré, qui étaient aussi de la partie.

Cet événement a été possible grâce à la conclusion, cinq mois plus tôt, de l’Accord politique de Ouagadougou. Un accord qui, plus que jamais, et irréversiblement, on le souhaite, a mis l’Eléphant d’Afrique, la Côte d’Ivoire, sur le chemin de la paix, de la réconciliation et de la réunification. Et il n’y a qu’à écouter les uns et les autres pour s’en convaincre. Que ce soit chez Gbagbo ou chez Soro, le discours est constant : la guerre est finie, la tempête est passée.

Et de fait, de nombreux indices montrent qu’on peut les prendre au sérieux, car, depuis, le gouvernement d’union nationale fonctionne tant bien que mal, le processus d’identification suit son cours, tout comme celui du DDR (désarmement, démobilisation et réinsertion), l’administration continue son mouvement de déploiement sur l’ensemble  du territoire national, l’état-major intégré des deux forces militaires (loyaliste et rebelle) est en place. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les deux ex-belligérants travaillent à donner raison au père de la Nation, Félix Houphouët Boigny, qui aimait à dire que «la paix, ce n’est pas un mot, c’est un comportement».

Evidemment, tout n’est pas rose, loin s’en faut, mais l’essentiel est que, globalement, tout le monde regarde dans la même direction, même si, c’est vrai, il y a eu quelques soubresauts et des couacs heureusement très vite circonscrits, notamment sur le plan du DDR, où on a vu le commandant de la zone de Séguéla, Zakaria Koné, refuser de rentrer dans les rangs.

Il y a certes des progrès sur le chemin de la foi, mais il faut éviter tout optimisme béat. La prudence doit être de rigueur et ce n’est pas pour rien que le Conseil de sécurité de l’ONU a décidé, mardi dernier, de prolonger, de six mois, le mandat de ses casques bleus et celui de la force Licorne. Avec ce nouveau mandat, ces forces impartiales pourront contribuer à la surveillance et à la sécurisation du processus de l’élection présidentielle du 30 novembre.

Voilà d’ailleurs une échéance qui cristallise toutes les passions au bord de la lagune Ebrié. Les appétits présidentiels des uns et des autres étant voraces. Et depuis l’Accord politique de Ouagadougou, chaque membre du trio magique (Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié) affûte, sans fin, ses armes pour aller à la conquête de l’électorat.

Dans ce combat de positionnement, Laurent Gbagbo, au pouvoir depuis déjà huit ans, semble avoir une longueur d’avance sur ses challengers. Mais chacun croit à son étoile. Pourtant, la désillusion sera grande à l'issue du scrutin du 30 novembre, puisque, forcément, ce n’est qu’un seul des trois prétendants qui sera élu président.

Pour sûr, ils ne se feront pas de cadeau. Et Laurent Gbagbo, qui a les ficelles en main, veut déjà commencer à en user. En effet, les rumeurs de remaniement ministériel sont persistantes à Abidjan. Mais elles ne sont pas pour plaire aux opposants. Mais pourquoi diable vouloir  défaire un attelage pour lequel il y avait eu un large consensus ?

Voilà déjà donc une discorde, que le facilitateur, Blaise Compaoré, gagnerait à arbitrer afin d’éviter que la mécanique de sa médiation ne prenne là un grain de sable. Tout remaniement est politique et commandé par certains intérêts. Et on peut parier que si les opposants n’y trouvent pas leurs comptes, ils vont se rebiffer ; chose qui va électriser l’atmosphère politique ivoirienne.

Si Blaise pouvait profiter de son séjour à Bouaké pour rencontrer les protagonistes de cette scène politique, et tenter d’aplanir cette difficulté, ce serait une très bonne chose. Sinon, très rapidement, le pays pourrait se retrouver dans une impasse à cause de quelques strapontins ministériels. Il faut donc s’entendre sur l’essentiel afin de permettre à la flamme de la paix de continuer à brûler en Côte d’Ivoire.

San Evariste Barro

L’Observateur Paalga du 31 juillet 2008




31/07/2008
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